Je suis intervenu hier lors de la discussion générale de l’examen de la proposition de loi relative aux modalités de calcul du potentiel fiscal agrégé des communautés d’agglomération issues de la transformation de syndicats d’agglomération nouvelle :
Seul le prononcé fait foi :
Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Rapporteur,
Mes chers collègues,
L’apparition de « villes nouvelles », dans les années 70, n’est pas le fruit d’initiatives locales. Bien au contraire, c’est le résultat d’une vaste politique nationale d’aménagement du territoire.
Puisque ces villes ont été conçues pour appliquer une stratégie d’Etat, il n’était pas illégitime, à leur création, qu’elles bénéficient d’un statut dérogatoire à celui des autres collectivités, dont le développement n’était pas pareillement contraint.
Aujourd’hui, près d’un demi-siècle après leur création, il ne semble pas moins illégitime d’envisager leur retour progressif dans le giron du droit commun.
Une telle régularisation ne constituerait pas pour autant un abandon. Leur spécificité pourrait désormais être traitée, non plus en référence à leur histoire, mais sur la base de critères socio-économiques objectifs, que d’autres collectivités, malgré un passé différent, peuvent avoir en commun.
Cette perspective de normalisation semble d’ailleurs unanimement partagée, y compris par les élus des collectivités concernées.
Mais tel n’est pas l’objet de ce texte, mes chers collègues, ne nous trompons pas de débat.
Cette proposition de loi vise seulement à remédier, à titre conservatoire, aux conséquences indésirables d’un travail parlementaire contestable.
En effet, l’amendement au dernier PLFR, qui a restreint l’avantage des EPCI héritiers des villes nouvelles, a été déposé à l’Assemblée nationale à la dernière minute, avec un argumentaire erroné, avant d’être adopté sans débat.
Au Sénat, notre rapporteur général, à qui rien n’échappe, a bien noté dans son rapport qu’en réalité, la disposition n’était pas sans effets. Néanmoins, le Sénat l’a adoptée conforme, là aussi sans débat, ni en commission, ni en séance.
Je ne crois pas que ce dysfonctionnement législatif, car je considère que c’en est un, soit le fait de manquements malencontreux de tel ou telle. Il me semble plutôt – et mon collègue André Gattolin s’en est souvent fait l’écho à cette tribune – que nous observons là une conséquence concrète des problèmes structurels qui caractérisent l’examen automnal des textes budgétaires.
Puisque c’est celui qui est incriminé, je pointerai en particulier ici le détournement systématique du PLFR de fin d’année. Alors qu’il a pour seule vocation d’ajuster l’équilibre budgétaire de l’exercice qui s’achève, par la prise en compte des aléas de gestion, il est en réalité utilisé comme une sorte de voiture-balai fiscale.
Ajoutant à cela des délais très courts, nous nous retrouvons à y examiner des mesures nombreuses, souvent complexes, dans un temps qui ne permet pas toujours un travail satisfaisant.
Je crois d’ailleurs, Monsieur le Président, qu’il serait de la responsabilité du Sénat, compte tenu de l’attention particulière que nous portons à la qualité de la production législative, que de conduire une réflexion approfondie à ce sujet.
Pour le cas qui nous occupe, à ce problème de procédure s’est ajoutée une difficulté, assez spécifique aux finances locales : l’impossibilité de raisonner théoriquement. En effet, lorsqu’on touche aux ressources des collectivités, quelle que soit la pertinence intellectuelle du mécanisme proposé, il n’est toujours évalué qu’à l’aune de ses conséquences. Or la disposition du PLFR n’avait fait l’objet d’aucune évaluation.
Il y a d’ailleurs de quoi s’interroger sur le fait que, même aujourd’hui, les seules simulations dont nous disposons soient celles des cabinets privés, mandatés par les collectivités concernées.
Que nous n’ayons donc pas légiféré dans des conditions satisfaisantes pourrait déjà suffire, me semble-t-il, à soutenir cette proposition de loi.
Certes, on pourrait être fondé à s’inquiéter du pouvoir de persuasion d’un groupe de collectivités aussi restreint. A supposer que le vote du Sénat soit conforme, nous serions en effet en présence d’une proposition de loi définitivement adoptée deux semaines seulement après son dépôt. Peut-être les services sauront ils nous le préciser mais nous ne devons pas être loin du record de la Ve République !
Quoi qu’il en soit, je crois que la formulation de l’article premier est de nature à lever les craintes. En effet, la révision complète de la dérogation, avant la fin de l’année, n’est pas un simple engagement politique ; ce sera, avec ce texte, inscrit dans la loi.
En conclusion, compte tenu des conditions contestables dans lesquelles l’amendement au PLFR a été adopté, de la mauvaise évaluation de ses conséquences, pourtant imminentes, et de la révision éclairée du dispositif qui sera entreprise au prochain PLF, le groupe écologiste, par ailleurs favorable à une extinction progressive de la dérogation, votera en faveur de cette proposition de loi.
Je vous remercie.