Je suis intervenu hier en séance publique dans le cadre de la discussion générale du projet de loi Egalité réelle en outre-mer :
Seul le prononcé fait foi :
Madame la Présidente,
Madame la Ministre,
Mesdames et Messieurs les rapporteurs,
Mes chers collègues,
Les territoires d’outre-mer connaissent depuis des décennies de graves difficultés sociales et économiques, inégalités héritées de l’histoire coloniale que la République peine à résorber.
Les problèmes éducatifs, sanitaires, économiques, les difficultés d’accès aux droits, aux services publics ou à l’emploi, sont régulièrement dénoncés par les habitants, les associations et les élus de ces territoires, sans que ne soit constatée d’amélioration de la situation. Ce projet de loi vise à répondre à une partie de ces problèmes, et il est très attendu.
Ces difficultés, beaucoup nous en font part et depuis des années. Récemment nous avons pu échanger à ce sujet avec les communautés amérindiennes – Palikurs, Wayanas, Kaliña, Teko, Wayampi, Lokono – et bushinengués, que ma collègue Aline Archimbaud a rencontrées lors de sa mission en Guyane en 2015 et qui se sont déplacées à Paris au mois de novembre 2016 pour exprimer leur colère face la lenteur des changements, leurs revendications et leurs attentes.
La République est une tout en étant diverse. C’est là à la fois son indubitable richesse et en même temps une source de difficulté lorsque l’on réforme. A rebours du jacobinisme uniformisant, il faut mettre en place les conditions de l’exercice effectif des droits, en analysant chaque territoire et en prenant en compte ses spécificités.
Nous nous réjouissons que nombre de nos propositions aient été retenues :
- sur l’information des jeunes en matière de santé,
- sur le renforcement de la représentativité du nouveau Grand Conseil coutumier en Guyane et sur l’extension de leur champ de compétences,
- sur la lutte contre l’orpaillage illégal en Guyane dont nous connaissons les ravages, à la fois sur la santé des populations du fleuve, sur leur sécurité et sur l’environnement.
Enfin, et c’est là la fin d’une véritable injustice envers les victimes des essais nucléaire, enfin, la notion de risque négligeable est supprimée de la loi Morin ! Les victimes, et en particuliers les civils, pourront être indemnisées suite à leur exposition aux retombées des essais nucléaires dont les radiations, je veux le rappeler, correspondent, en cumulé, à 9900 fois la bombe d’Hiroshima !
Nous espérons que la nouvelle commission créée la semaine dernière à l’Assemblée par un amendement du gouvernement ne remettra pas en cause cet acquis fondamental. La loi Morin est une loi de présomption et indique clairement que les personnes concernées par l’indemnisation sont les demandeurs ET leurs ayants droits. Qu’entend donc le gouvernement par « réserver l’indemnisation aux personnes dont la maladie est causée par les essais nucléaires » ? Ce n’est pas clair et cela suscite l’inquiétude des associations et des victimes.
Ceci dit, nous avons quelques grands regrets dans ce projet de loi:
Nous avions adopté au Sénat un amendement permettant de poser les fondements de la création d’un Observatoire du suicide en Guyane pour s’attaquer enfin à ce grave problème et créer les conditions d’un mieux-être pour tous ces jeunes qui n’ont plus d’espoir en l’avenir. Contrairement à ce que nous avons entendu pendant les débats, les représentants des populations autochtones de Guyane sont favorables à sa création. Cette disposition a été, de façon totalement incompréhensible, supprimée par la commission mixte paritaire ! Au vu de l’importance du fléau que sont les suicides en Guyane, et notamment chez les jeunes et les très jeunes amérindiens, cette suppression est pour nous inadmissible et témoigne d’un véritable désintérêt des parlementaires pour ce problème grave, ce mal-être profond, que ressentent ces enfants.
Nous avions également déposé un amendement sur l’accès à l’éducation en langue maternelle qui a été rejeté. C’est pour nous incompréhensible quand on voit le besoin pour les enfants de pouvoir étudier, au moins en partie, dans leur langue maternelle puisque beaucoup ne maitrisent pas le français en arrivant à l’école. Les langues autochtones doivent être reconnues, d’autant plus lorsque l’on veut lutter contre l’échec scolaire et donner à tous les moyens de réussir.
Mes chers collègues, ce texte est plein de bonnes intentions, de bonnes mesures attendues depuis des années, mais il suscite également des déceptions. Le groupe écologiste, en souhaitant que le travail continue pour aboutir à une véritable égalité entre les habitants de l’hexagone et les habitants des outre-mer, votera ce texte issu de la commission mixte paritaire.