Les écologistes s’inquiètent des risques de conflit d’intérêts introduits par l’article 57 autorisant Areva à rémunérér des études de l’Agence de Sureté Nucléaire. Une fois devenue tributaire des financement de la filière nucléaire, l’ASN restera-t-elle toujours indépendante ?
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard pour présenter l’amendement n°466.
M. Jean Desessard. L’article 54 vise à permettre à l’Autorité de sûreté nucléaire, l’ASN, de percevoir une rémunération lorsqu’elle coopère avec ses homologues étrangers et de procéder à l’examen de conformité du matériel destiné à l’export.
Or l’ASN est une autorité indépendante et doit, à ce titre, être au-dessus de tout soupçon puisqu’elle est chargée de donner aux opérateurs des consignes dont elle est chargée de garantir le respect. Dès lors, intégrer une dimension financière dans les échanges qu’elle noue avec les autorités de sûreté nucléaire étrangères ne nous semble pas être un moyen de garantir le respect de cet impératif.
Considérant qu’il s’agit là d’un problème éthique majeur, les écologistes souhaitent que les relations entre autorités de sûreté nucléaire restent désintéressées.
De plus, l’alinéa 3 de l’article 54 pose également problème. Il prévoit en effet que l’ASN examine « la conformité des options de sûreté des modèles d’installations nucléaires destinées à l’exportation ». Or l’ASN n’est pas un bureau d’études. L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, l’IRSN, pourrait parfaitement tenir ce rôle.
Par ailleurs, l’ASN est une autorité dont la vocation est de prendre des décisions. Or la rédaction de l’article 54 ne précise pas le sort que l’on réserve aux avis de l’Autorité et ne lui donne pas les moyens de s’opposer à l’exportation d’une centrale nucléaire.
Enfin, l’alinéa 2 de l’article prévoit que l’ASN est rémunérée par l’entreprise exportatrice, ce qui signifie qu’elle deviendra la cliente de groupes comme EDF ou AREVA. Cela pose là encore un problème de déontologie et d’éthique.
Pour toutes ces raisons, et afin de préserver l’indépendance de l’ASN, nous proposons la suppression de cet article. […]
—
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard pour présenter l’amendement n°467.
M. Jean Desessard. Il s’agit là d’un amendement de repli.
Si l’ASN doit vérifier la conformité des équipements nucléaires destinés à l’export aux normes de sûreté françaises, nous estimons qu’elle doit a minima examiner aussi les conditions de sécurité dans lesquelles ces installations sont implantées dans le pays d’accueil. Des équipements français, même s’ils sont élaborés avec les meilleures normes, ne sont pas sûrs dès lors que les installations d’accueil ne le sont pas.
De surcroît, la notion de sécurité qui figure dans cet amendement ne correspond pas à la seule sûreté technique : elle prend également en considération le contexte du pays d’accueil. Cette garantie est primordiale dès lors que nous exportons nos équipements dans des pays dont la stabilité politique n’est pas toujours assurée.
Notre amendement permettra ainsi à 1’ASN de s’opposer à l’export de technologies lorsque celles-ci pourraient être utilisées dans une zone de conflit ou être menacées par une situation géopolitique dangereuse.
Le nucléaire n’est pas une technologie d’exportation comme les autres. Avec cet amendement, nous souhaitons par conséquent inscrire dans la loi la nécessité de la précaution.
Je reviens un instant à l’amendement précédent : une haute autorité doit absolument être dégagée de toute relation financière avec les structures sur lesquelles elle est amenée à exercer son expertise. L’indépendance implique l’absence de lien financier.