Les rapports de l’ONG Oxfam France montrent comment la financiarisation des marchés alimentaires et agricoles contribue à la faim dans le monde. Nous demandons au gouvernement d’utiliser la loi bancaire pour agir sur les banques et lutter contre la spéculation sur la faim.
Question à M. Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget. Vidéo
Monsieur le Ministre,
Dans le monde, dans notre monde, une personne sur neuf souffre encore de la faim. Des apprentis sorciers nous expliquent que c’est par manque de nourriture et que ce sont des OGM qu’il nous faudrait pour nourrir les plus pauvres.
En réalité, les famines ne sont pas dues au manque de nourriture. Elles sont dues aux conflits armés, au changement climatique, à la concurrence déloyale de nos pays développés et, surtout, au prix de la nourriture. Non seulement le prix moyen des matières premières agricoles augmente constamment, mais il est de plus en plus volatil, c’est-à-dire qu’il peut connaître des pics brutaux et très élevés, dévastateurs pour l’accès à la nourriture des populations les plus fragiles.
Cette volatilité des prix est la conséquence directe de la financiarisation des marchés alimentaire et agricole. Dans une de ses études, la Banque mondiale a par exemple montré que « les activités des fonds indiciels de matières premières ont joué un rôle clé dans la flambée des prix alimentaires de 2008. »
Or, qui propose ces fonds indiciels aux investisseurs ? Ce sont les banques, et en particulier les banques françaises. Dans son récent rapport, l’ONG Oxfam indique que BNP Paribas, la Société générale et Natixis gèrent à elles trois 3,5 milliards d’euros d’actifs dans des fonds indiciels agricoles.
Monsieur le Ministre, dans le cadre de la loi bancaire, des amendements du Sénat, notamment écologistes, avaient introduit davantage de contrôle et de transparence sur la spéculation agricole. Pouvez-vous nous dire où nous en sommes de l’application de ces mesures par l’Autorité des Marchés Financiers ?
Et au-delà des dispositions légales, Monsieur le Ministre, trouvez-vous politiquement acceptable que des banques françaises spéculent sur la faim ?
Car une chose est sure : quand on voit la facilité qu’a eue BNP Paribas à absorber son amende américaine de 9 milliards de dollars, le monde des spéculateurs ne connait pas la famine !
Le Gouvernement, qui vient de négocier pour elles plusieurs milliards d’euros de rabais sur leur contribution au Fonds de résolution européen, ne peut-il pas user du rapport de force pour les ramener à la raison ?
(Question préparée par André Gattolin et Nicolas Jouve)
Références sur le site de l’ONG Oxfam France :
- Rapport du 23 février 2015 – Les banques françaises spéculent-elles toujours sur la faim ?
- Dossier – Marché agricoles et prix alimentaires,
- Rapport du 12 février 2013 – Banques : la faim leur profite bien.