Monsieur le président, Madame la ministre, Madame la présidente de la commission des affaires sociales, Mes chers collègues,
Le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 est une traduction du pacte de responsabilité, qui formalise l’objectif économique voulu par le Gouvernement : alléger le coût du travail pour relancer l’activité – l’intention est sans doute louable, mais il faut encore la réaliser.
Avec les 20 milliards d’euros du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, 41 milliards d’euros au total seront accordés aux entreprises ; le Gouvernement estime que cette manne financière nouvelle permettra aux entreprises de créer 190 000 postes supplémentaires.
Comme M. le rapporteur général l’a souligné cet après-midi, le pacte de responsabilité, c’est la confiance. Seulement, la confiance, ce n’est pas un pari : elle se construit et elle se vérifie.
Or, aujourd’hui, rien ne garantit que les entreprises utiliseront ces nouvelles marges de manœuvre pour créer des emplois. En effet, l’histoire prouve que, jusqu’à maintenant, les allégements de charges ont toujours profité au capital plutôt qu’au travail. Ainsi, entre 1993, date à laquelle les premiers allégements de charges ont été accordés, et 2013, la part de la valeur ajoutée des entreprises allouée aux salaires est restée quasiment stable, puisqu’elle s’est établie respectivement à 48 % et 51 %, tandis que la part allouée aux dividendes a plus que doublé, passant de 6 % à plus de 14 %. L’effet de ces allégements sur l’emploi est donc peu évident.
Pour financer ces allégements de charges, le Gouvernement fait le choix de réduire la dépense publique de 50 milliards d’euros à l’horizon de 2017. Madame la ministre, il y a là un paradoxe : comment peut-on reconnaître que la santé, la justice, l’action sociale et la prise en charge de la dépendance ont besoin de moyens et de postes supplémentaires et annoncer en même temps un plan d’économies sans précédent sur la dépense publique ?
Du reste, nous, écologistes, ne sommes pas les seuls à faire cette analyse ; elle est partagée par les communistes, bien sûr, mais aussi par d’autres. En effet, selon la direction du Trésor, si les mesures du pacte devraient susciter 190 000 emplois et 0,6 point de croissance cumulée à horizon de 2017, les 50 milliards d’euros d’économies devraient provoquer, à la même échéance, la suppression de 250 000 emplois et une baisse de croissance cumulée de 1,4 point. Autrement dit, on croit gagner quelque chose d’un côté, mais on perd davantage de l’autre, y compris sur le plan de l’emploi.
Par ailleurs, le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 manque d’équité, dans la mesure où il prévoit le gel de certaines prestations.
Le projet initial prévoyait un gel des aides personnalisées au logement, mais un amendement du rapporteur de l’Assemblée nationale a supprimé cette mesure, ce dont nous nous félicitons.
Reste que le gel des pensions de retraite supérieures à 1 205 euros pendant un an est maintenu, ce que nous déplorons. Il faut se souvenir que la loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites a déjà repoussé la revalorisation de six mois. Si ce gel est adopté, on atteindra donc, au total, dix-huit mois sans revalorisation.
Ainsi, ce collectif budgétaire est inspiré par le choix de pratiquer une politique de l’offre indifférenciée, et il fragilise les retraités ; nous ne le cautionnons pas.
Les écologistes proposent un autre modèle, que je n’ai pas le temps d’exposer en détail : soutenir les secteurs porteurs d’avenir, comme la transition énergétique et écologique, et encourager les comportements vertueux des entreprises par des incitations ciblées et responsables, tout en garantissant la justice sociale par des contributions progressives.
Dans ses communications, le Gouvernement annonce vouloir soutenir les plus modestes. Pour vraiment agir en leur faveur, nous vous proposons une solution plus juste et plus efficace, dont le premier élément est l’instauration d’une CSG progressive.
Quant aux allégements de charges sur les bas salaires, nous n’y croyons pas. D’ailleurs, le rapport de la mission commune d’information sur la réalité de l’impact sur l’emploi des exonérations de cotisations sociales accordées aux entreprises, qui n’a pas été adopté ce matin, confirme qu’il n’y a aucune certitude que cette politique crée des emplois.
Opposés aux allégements de charges sur les bas salaires, nous présenterons des amendements destinés à réduire les inconvénients de ces mesures ; en particulier, nous proposerons d’instaurer une conditionnalité en réservant les allégements aux postes en CDI ou à temps complet.
Nous défendrons également une réduction des cotisations sociales de 500 euros par mois et par apprenti pour développer l’apprentissage, ainsi que l’ouverture des emplois d’avenir aux chômeurs de longue durée. Ces mesures, temporaires, puisque nous proposons de les mettre en place jusqu’en décembre 2015, permettront de donner un coup de pouce supplémentaire à la création d’emplois, par le biais d’aides financières qui, elles, auront des effets rapides et mesurables.
Pour l’exonération de contribution sociale de solidarité des sociétés, nous proposerons que l’allégement bénéficie aux entreprises qui communiquent sur leur politique de salaires, de dividendes et d’optimisation fiscale.
Enfin, nous proposerons la suppression du gel des retraites, car il n’est pas acceptable que les seules économies prévues par le projet de loi soient réalisées avec les pensions des retraités !
Madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 accorde aux entreprises des faveurs et peut-être même des cadeaux – l’avenir le dira –, de surcroît sans contrôle ni conditionnalité, fragilise les retraités et réduit notre protection sociale ; dans sa rédaction actuelle, il ne correspond pas aux attentes des écologistes !
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