Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues,
Les jeux d’argent et de hasard en ligne posent de nombreuses questions en termes de santé et d’ordre public. Ils s’accompagnent d’ailleurs bien souvent d’un risque important de dépendance aux jeux et aux écrans, comme l’a souligné mon collègue André Gattolin sur un sujet voisin dans son rapport d’information intitulé Jeux vidéo : une industrie culturelle innovante pour nos territoires.
La loi du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne, en mettant fin au quasi-monopole de la Française des jeux et du PMU, a ouvert à la concurrence les jeux d’argent et de hasard en ligne. Du fait des risques inhérents à la libéralisation du secteur, il était essentiel d’encadrer et de réguler ces activités. C’est la raison pour laquelle l’Autorité de régulation des jeux en ligne a été mise en place ; les écologistes s’en réjouissent.
L’ouverture à la concurrence des jeux d’argent et de hasard en ligne n’est pas sans présenter des risques, de différentes natures. D’une part, on observe des risques particuliers liés à la dématérialisation et à l’utilisation d’Internet qui participent au pouvoir addictif des jeux en ligne et peuvent conduire à la rupture du lien social.
D’autre part, on peut noter les risques de blanchiment d’argent sale ou encore de corruption sportive.
Le président de l’Autorité a ainsi pour rôle de veiller à faire en sorte que l’institution mène à bien ses responsabilités, comme l’octroi d’agrément aux opérateurs qui le sollicitent, le contrôle du respect de leurs obligations par ces opérateurs agréés, l’évaluation des résultats des opérations de prévention du jeu excessif ou pathologique par ces opérateurs ou encore la lutte contre les sites illégaux et les conflits d’intérêts.
Néanmoins, la gouvernance de l’institution ne peut pas être reléguée au second plan. En 2010, à l’époque de la création de l’ARJEL, François Marc, notre actuel rapporteur général de la commission des finances, proposait déjà à cette même tribune le renforcement et l’extension des missions de l’Autorité, malgré les réticences de la majorité sénatoriale d’alors.
C’est pourquoi la proposition de loi organique que nous examinons aujourd’hui est d’une grande importance. Rappelons qu’elle a pour unique objet de soumettre la nomination du président de l’ARJEL à l’avis public des commissions des finances des deux chambres. Je remercie M. Marc et Mme André d’avoir pris cette excellente initiative.
À l’heure actuelle, soit trois ans après la création de l’ARJEL et l’ouverture à la concurrence du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne, les études commandées par l’Autorité rapportent que, parmi les 1,7 million de joueurs actifs, 6,6 % – c’est tout de même assez important – ont des comportements excessifs, et 10,4 % sont considérés comme « à risque modéré ». Ces chiffres nous interpellent d’autant plus que les paris sportifs sont en pleine croissance. On observe ainsi une augmentation de 19 % en 2012. Le nombre de joueurs à risque menace donc d’augmenter.
La mission de régulateur de l’ARJEL est essentielle aux yeux du Parlement, d’où cette volonté de participer à la nomination du président de l’Autorité. La légitimité de l’institution ne saurait être entachée par le manque de transparence de sa gouvernance.
Comme l’ont souligné M. Baylet et M. le ministre, le cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution consacre l’intervention du Parlement, et cette prérogative est affirmée pour la nomination de la présidence de nombreuses autorités administratives indépendantes, comme l’Autorité de la concurrence, la Haute Autorité de santé ou encore le Conseil supérieur de l’audiovisuel.
Il est parfaitement légitime que le Parlement exerce ainsi son contrôle démocratique, l’une de ses fonctions premières. Il convient donc de pallier les anomalies qui demeurent. Au vu des enjeux démocratiques et éthiques, le groupe écologiste votera naturellement pour cette proposition de loi organique.