A l’occasion de l’article 52 traitant de l’économie réelle, les écologistes proposent d’évaluer l’enseignement de l’économie dans les universités. Ils s’inquiètent en effet de l’hégémonie de la doctrine néo-libéral dans l’enseignement.
M. le président. L’amendement n° 465, présenté par M. Desessard
M. Jean Desessard. Cet amendement porte sur la philosophie même qui anime nos politiques et notre vision de l’économie.
Aujourd’hui, les analystes, les chercheurs et les intellectuels dans le domaine de l’économie sont, dans leur écrasante majorité, des économistes « orthodoxes » : ils considèrent que les agents économiques se comportent de façon rationnelle, maximisant leurs profits selon les situations.
Partant de ce constat, cette doctrine orthodoxe accorde une place centrale à la modélisation mathématique, à l’économétrie et à l’étude des grands équilibres pour fonder ses analyses. Aujourd’hui, l’approche néoclassique libérale attire la plupart de ses adeptes.
Toutefois, de nombreux économistes, dits « hétérodoxes », rejettent cette vision simpliste, mathématique. Ils s’éloignent des dogmes, des postulats orthodoxes et élargissent leur vision de l’économie en y intégrant des apports de l’anthropologie, de la sociologie et d’un large panel de sciences sociales. Pour eux, l’irrationalité doit être prise en compte, car elle est au cœur de la nature humaine. Le pouvoir, les conflits, les affects, les liens de domination sont des variables à part entière et doivent être considérés comme telles.
Aujourd’hui, l’organisation de la section « Sciences économiques » du Conseil national des universités, le CNU, ne permet pas de garantir une pluralité suffisante entre ces deux approches. En effet, le recrutement d’économistes dits hétérodoxes a chuté de 18 % entre 2000 et 2004 à 5 % entre 2005 et 2011.
Le présent amendement tend à demander la remise par le Gouvernement d’un rapport permettant d’évaluer l’opportunité de créer une section « Économie et Société », afin de donner à ces économistes hétérodoxes un espace d’expression dans notre système universitaire.
Les dogmes de l’économie libérale nous montrent chaque jour leurs échecs et leurs dangers. II nous semble urgent de créer les conditions d’un débat contradictoire entre plusieurs visions du monde et de briser le monopole d’une pensée réductrice, ayant trop longtemps nourri idéologiquement toutes nos politiques publiques.
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