Par Guillaume Perrault
09/10/2010 |
Le Sénat a adopté vendredi soir le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans par 186 voix contre 153.
L’ancien premier ministre Pierre Mauroy a défendu, en vain, la retraite à 60 ans qu’il avait fait adopter en 1982. Les sénateurs, qui ont également adopté un amendement sur les handicapés, devront discuter lundi du report à 67 ans de la retraite à taux plein.
Le Sénat a largement adopté vendredi soir le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans par 186 voix contre 153. Les sénateurs UMP et centristes ont voté pour cette mesure clé du projet de loi sur les retraites, et leurs collègues socialistes et communistes se sont prononcés contre. Le vote conforme, par le Sénat, de cette disposition déjà adoptée par l’Assemblée lui donne un caractère définitif. Il n’est désormais plus possible de la modifier au cours de la procédure parlementaire, sauf à abandonner l’ensemble du projet de loi.
Ce vote à forte portée symbolique intervient alors qu’une nouvelle journée de grève et de manifestations se déroulera mardi. Les orateurs socialistes et communistes avaient multiplié les demandes d’explication de vote. «Si l’on vit plus longtemps, c’est parce qu’on travaille moins !», a tonné Jean Desessard (Verts, Paris). «Je répète que les 62 ans de 2018 pèseront moins lourd biologiquement que les 60 ans de 1982, a rétorqué Éric Woerth. Dans les siècles passés, on était vieux à 45 ou 50 ans», a affirmé le ministre du Travail.
«Droit presque fondamental»
Pierre Mauroy, premier chef du gouvernement de François Mitterrand de 1981 à 1984, a défendu d’une voix calme la retraite à 60 ans qu’il avait lui-même instituée par ordonnances en 1982. «Nous pensons que c’est un droit presque fondamental», a déclaré le sénateur PS du Nord. La loi de 1982 instaurant la retraite à 60 ans, «c’est la loi la plus importante peut-être de la Ve République, celle qu’attendaient les Français», a-t-il lancé. «La liquider en catimini de cette façon, ce n’est pas possible.»
Pour Pierre Mauroy la réforme va pénaliser au premier chef les salariés qui exercent un emploi pénible. «Chacun est confronté à son devoir, Monsieur le premier ministre, lui a répondu Éric Woerth. Nous sommes confrontés à une situation de réalité.»
Amendement sur les handicapés adopté
La Haute Assemblée a ensuite engagé dans la nuit de vendredi à samedi l’examen de l’article 6 du projet de loi qui reporte de 65 à 67 ans l’âge permettant d’obtenir une retraite à taux plein quel que soit le nombre de trimestres cotisés. L’amendement du gouvernement à cet article 6, qui maintient à 65 ans l’âge d’une retraite sans décote pour les parents d’enfants handicapés, a pour sa part été adopté. C’est l’un des deux amendements annoncés jeudi par le gouvernement.
Un sous-amendement du président du groupe Union Centriste Nicolas About, qui élargit cette mesure aux parents d’un majeur handicapé dont ils s’occupent à domicile, a également été voté.
«Le nombre de bénéficiaires sera considérablement écrété», a cependant fait remarquer Isabelle Pasquet (PCF). Il s’agit «d’une peau de chagrin» a renchéri Guy Fischer (PCF). Bernard Frimat (PS) a jugé l’amendement «très insuffisant» regrettant son «manque de générosité». Le PS a cependant voté l’amendement du gouvernement «tout en disant le plus de mal possible» tandis que le groupe communiste s’est abstenu.
A droite, le vote n’a pas fait l’unanimité. Jacqueline Panis (UMP) a jugé l’avancée «insuffisante» et annoncée qu’elle s’abstenait. Alain Millon (UMP) a également exprimé des réserves se disant «inquiet» devant l’amendement du gouvernement.
Un vote lundi sur le report à 67 ans
La séance a ensuite été levée vers 3h15. Un compromis a été trouvé entre le président UMP du Sénat, Gérard Larcher, et l’opposition, qui entendait poursuivre sa guerilla parlementaire contre la réforme. Droite et gauche se sont finalement mises d’accord pour que l’article 6 soit voté lundi après-midi.
Le groupe PS s’est félicité que «le vote sur le coeur du texte devra attendre la semaine prochaine». «Le président de la République avait fixé le calendrier médiatique dès jeudi matin : des «concessions» annoncées à la dernière minute et adoptées avant le week-end afin d’amoindrir la contestation sociale. Cette stratégie a fait long feu. En effet, les amendements du gouvernement se sont heurtés à une résistance farouche de la gauche», ajoute-t-il.